Retour aux articles

La violation des règles du sport doit être caractérisée !

Civil - Responsabilité
04/04/2018
Les juges du fond ont manqué une étape dans l’appréciation de la recevabilité de la demande d’indemnisation formulée par une participante de la "Frappadingue" auprès de la CIVI : la caractérisation d’une violation des règles de la course.
À l’occasion de la célèbre "Frappadingue" une participante a été frappée, à la sortie d’un toboggan, par une concurrente non-identifiée. La requérante saisit une commission d’indemnisation des victimes d’infractions (CIVI) afin d’obtenir la désignation d’un expert et l’octroi d’une provision.
À l’appui de sa demande, elle produit des témoignages qui attestent que sa concurrente se tenait trop près lors de la descente en toboggan. La cour d’appel en déduit la commission d’une infraction de blessures involontaires et le droit de la requérante à obtenir indemnisation.

La Haute juridiction censure le raisonnement des juges du fond, elle affirme que dans un premier temps ces derniers auraient dû caractériser l’existence d’une violation des règles de la course et par la suite apprécier si cette violation est constitutive d’une infraction pénale au sens des articles 121-3 et 222-19 du Code pénal.
La Cour de cassation adopte un attendu de principe : « selon (l’article 121-3, alinéa 3, du Code pénal) les dispositions relatives à l’indemnisation des victimes d’une infraction ne sont pas applicables entre concurrents d’une compétition sportive qu’en cas de violation des règles du sport pratiqué constitutive d’une infraction pénale ».
La jurisprudence exigeait déjà l’existence d’une faute caractérisée pour retenir la responsabilité d’un participant à une compétition sportive, à savoir une violation des règles du sport pratiqué (Cass. 2e civ., 4 nov. 2004, n° 03-15.808, Bull. civ. II, n° 485).

Pour mémoire, la doctrine avait émis certaines critiques quant à la quasi systématicité de caractérisation de la violation des règles du jeu abandonnant la distinction entre « faute de jeu » et « faute contre le jeu » (RLDC 2005/15, n° 609, obs. Voinot D.). Une tendance avait alors été observée en faveur de l’abandon du principe d’acceptation des risques (voir en matière de responsabilité du fait des choses : Cass. 2e civ., 4 nov. 2010, n° 09-65.947, Bull. civ. II, n° 176). La loi de 2012 a créé l’article L. 321-3-1 du Code du sport qui consacre le principe d’acceptation des risques (L. n° 2012-384, 12 mars 2012). En outre, l’on sait que la jurisprudence se montre particulièrement rigoureuse à l’égard des participants d’une compétition sportive, elle écarte ainsi l’application du régime protecteur de la loi Badinter aux courses automobiles à raison de la qualité de « concurrent » des participants (Cass. 2e civ., 19 juin 2003, n° 00-22.330, Bull. civ. II, n° 197 ; Cass. 2e civ., 4 janv. 2006, n° 04-14.841, Bull. civ. II, n° 1).

La Haute juridiction inscrit donc cet arrêt dans la généralisation de l’acceptation des risques en matière de compétition sportive afin que la responsabilité des participants soit subordonnée à la caractérisation d’une faute caractérisée et ne soit pas admise de plein droit ou par la seule caractérisation d’une infraction pénale décontextualisée.
Source : Actualités du droit